lundi 9 septembre 2013

L'ARRIVÉE DES CIGOGNES













L’ARRIVÉE DES CIGOGNES










Quand j’étais petit … Mon Dieu, mon Dieu, suis-je si vieux maintenant ? … Quand j’étais petit, tout le monde savait bien que  les cigognes  apportaient les bébés : Chacun avait pu le voir : Hansi était venu sur terre enveloppé dans un drap noué et tenu dans le bec d’une cigogne.

Oui, mais Hansi était un petit Alsacien et les cigognes étaient en Alsace … Pas en Charente ! … Chez nous, les petits garçons naissaient dans les choux et les petites filles  naissaient dans les roses !

Dans nos marais, il y avait des hérons cendrés, beaucoup de hérons cendrés … À tel point que, dans les années qui ont suivi la deuxième guerre mondiale, tous les pêcheurs d’anguilles s’affolaient : Les hérons engloutissaient tout !

Eh bien maintenant, on cultive toujours des choux dans nos potagers et on plante de plus en plus de rosiers dans nos jardins, mais en plus … Nous avons des cigognes ! Elles sont arrivées récemment, somme toute : Ce n’est guère depuis plus de dix ou quinze ans qu’on peut les voir :

« Tu as vu ? … Depuis Saint-Agnant jusqu’à Marennes, tous les poteaux de la ligne à haute tension sont habités par les cigognes ! »

 Elles ont construit des nids sur les poutrelles … Des nids dont le volume augmente chaque année. Dès l’arrivée du printemps, les cigognes sont dans leurs nids. On ne tarde pas à distinguer les petits cigogneaux … Les parents, eux, arpentent gravement et solennellement le bords des ruissons et les bosses des marais, haut perchés sur leur longues pattes rouges …

Les cigognes sont d’abord apparues vers Brouage : Les membres de la Société de protection des oiseaux avaient installé des nichoirs artificiels, sur des poteaux de bois … Et, ma foi, maintenant, il y a des cigognes plein les marais … Le temps de nicher, d’élever les petits, puis elles sont reparties ! …  Je n’ai toujours pas réussi à en surprendre une au moment où elle apportait un bébé dans son bec !


                                               


Les hérons cendrés, eux, on les avait toujours connus chez nous : Tête rentrée dans le cou, faisant le gros dos … Ils attendent patiemment que le fretin passe à leur portée. De temps à autre, ils agitent leurs grandes ailles pour une courte envolée. Comme les vanneaux huppés, ils sont de chez nous depuis le fond des temps … Les vanneaux, en hiver, ils s’abattent par grands voiliers sur les prés, piaillant et piquant la terre humide pour chercher des vers. Sur le terrain d’aviation de Saint-Pierre, on peut en voir des milliers. Ils sont malheureux lorsque la terre est gelée.

Je me moquais de mon frère … Il vient de la Côte d’Azur pour passer quelques semaines, l’été : Il avait vu des aigrettes garzettes et il me disait qu’il avait vu … Des ibis sacrés ! … Sacré Pierre ! - Citadin, va !… Des ibis sacrés en Oléron ! … Les ibis, ce sont des oiseaux du Nil … C’est en Égypte qu’on les trouve ! Ce ne sont pas de très beaux oiseaux d’ailleurs : Ils ont le cou tout déplumé, ils sont tout bossus et ils sont noir et blanc. Je n’avais pas tort de me moquer du citadin  mais, quelques mois plus tard … Il aurait bien pu se moquer de moi : Là, dans les près, au milieu des derniers marais de Brouage … Toute une bande d’ibis sacrés ! … Je n’en croyais pas mes yeux ! Un peu plus tard, je retrouvai mes sacrés oiseaux dans l’île d’Oléron …. Après documentation j’appris qu’en effet, un couple d’ibis s’étant échappé des volières d’un zoo breton s’était reproduit, tant et si bien que maintenant, on tentait de les exterminer pour qu’ils ne fassent pas concurrence aux espèces locales !  Les ibis sacrés d’Isis et Osiris … en Oléron !


                                                   



Réchauffement climatique ? … N’allons pas trop vite aux conclusions … Les modifications de l’environnement et celles causées par les importations d’espèces étrangères sont en cause, elles –aussi.

Nous avons vu bien des modifications dans les peuplements, depuis notre jeune âge et nous en verrons d’autres …

Revenons aux aigrettes garzettes dont nous parlions tout à l’heure : La première fois que j’en ai vu … C’était à Brazzaville, au Congo ! Il y en avait partout où il y avait des bovins, ou si ce n’était des aigrettes garzettes, cela y ressemblait fort … On les appelait des « garde bœufs » ! Ces petits hérons blancs étaient très utiles au Congo : Non seulement ils débarrassaient soigneusement les bovins de leurs parasites, et c’est pourquoi on les voyait souvent perchées sur le dos des vaches et des bœufs … Mais, en plus, ils étaient très utiles … Aux footballeurs ! – En effet, comme les aigrettes  fréquentaient beaucoup les terrains de football, il suffisait d’aller les voir à la veille d’un match important … L’entraîneur français de l’équipe nationale n’y manquait jamais : Selon le positionnement des aigrettes sur la pelouse, on pouvait tirer des augures quant à la réussite ou bien à l’échec de la partie du lendemain … Et si une aigrette était perchée sur les bois des buts … Alors, on était sûr de gagner ! – C’est ainsi que l’entraîneur « gonflait » le moral de son équipe …

                                                           



Les aigrettes, moi, je les ai vues arriver en Oléron … Il n’y a pas si longtemps que ça ! La première, je l’ai vue à La Rochelle, au bord d’un canal, dans le jardin public ! Cette rencontre m’a beaucoup surpris. Et puis il en est arrivé beaucoup, surtout vers Boyardville. Elles se sont approprié un bel arbre, à côté du canal de La Perrotine, tout près de la maison de Monsieur Signol … Elles y ont établi leur base … Ont construit leurs nids dans les branches et … Maintenant, il y en a partout … Dans les marais, du Nord au Sud de l’île … Dans les près … Au bord de mer, quand la marée découvre l’estran … L’aigrette garzette, toute blanche, avec sa plume sur la tête … Sa plume qui lui donne son nom …. C’est maintenant l’oiseau que l’on voit partout !

Est-ce l’arrivée des aigrettes qui a causé la quasi disparition des avocettes ? …
Je ne saurais répondre à cette question, mais effectivement, les avocettes qui autrefois étaient nombreuses se font très rares aujourd’hui. Ce sont d’élégants oiseaux blancs aux longues pattes. On les reconnaît à leur bec recourbé vers le haut, contrairement à celui des courlis, que l’on appelle chez nous des « courbejaux » . Les courlis passent toujours et font entendre leur double sifflet, sur deux tons : Le premier long, le second bref … Mais les avocettes sont classées parmi les espèces protégées, en voie de disparition.

Les échasses sont aussi des oiseaux élégants, leva nt haut les pattes, qu’elles ont rouges. On les trouve au beau milieu des marais, fouillant la vase molle à la recherche de leur nourriture. Elles nichent chez nous et, lorsqu’on approche tant soit peu du nid d’une échasse, celle-ci s’élève en criant comme une vieille charnière rouillée. Elle ne s’éloigne guère, tout en continuant à crier. Elle bat des ailes. Son vol décrit des cercles autour du nid, jusqu’à ce que vous vous soyez éloigné.  Il y a encore beaucoup d’échasses à pattes rouges en Oléron, mais il me semble qu’il y en a moins qu’autrefois …


                                                               


Dans nos marais et leurs canaux vous pourrez trouver des cygnes. Je n’en avais jamais vu pendant ma jeunesse. Ils sont arrivés approximativement en même temps que les cigognes, c’est-à-dire tout récemment. Un jour, revenant de La Rochelle et, bien sûr, ayant fait le détour par la route de Brouage, j’ai vu dans un pré un groupe de cygnes posés les uns à côté des autres … Il y en avait tant que j’ai cru voir un troupeau de moutons, derrière les tamarins ! Ils arrivent en groupes, en effet, puis ils se dispersent ensuite par couples.

 Ils nichent chez nous et vous pourrez en rencontrer plusieurs couples, suivis de la kyrielle de leurs petits. Le cygne adulte est blanc, mais les jeunes sont grisâtres. Ils sont parfaitement dédaigneux et indifférents … Vous pourrez les approcher de très près sans qu’ils modifient pour cela leur comportement : Ailes légèrement écartées, souvent, et une patte relevée sous l’une d’elles, ou bien le cou replié, la tête cachée  … Vous ne troublerez guère leurs évolutions aquatiques …  À moins que vous ne soyez accompagné d’un chien … Alors, là, ils pédaleront de toutes leurs forces pour se propulser sur l’eau … C’est lourd, un cygne, et le décollage est difficile … Difficile et très bruyant : Le battement des ailes s’ajoute au battement des palmes !

J’ai trouvé un jour un cygne adulte sur la route qui va des Allards à Boyardville … Si cela vous arrive … Oh ! Je vous en prie … Ralentissez votre voiture : Cet oiseau splendide ne trouve pas assez d’espace dans la largeur de la route pour le décollage … Une haie à droite, une haie à gauche : Quand il a voulu décoller, il est tombé dans la haie ! Mais une fois qu’il a décollé, alors là, le cou tendu en avant, il assure son vol et s’en va tout droit …
Son vol est bruyant : ses deux ailes battent ensemble et produisent des sifflements rythmés qui le font entendre  de loin … Ah ! Les cygnes qui passaient au-dessus de mon jardin , à Saint-Georges,  juste à hauteur des toits !

Parler de modifications climatiques à propos des cygnes ? –  Je ne suis pas certain que ce soit opportun.

Je ne voudrais pas oublier d’évoquer le passage des tadornes … Le tadorne de belon, c’est là son véritable nom, est un superbe oiseau bicolore, dont la grosseur approche celle de l’oie … Est ce un canard ? – Est ce une oie ? Il arrive qu’on les rencontre en petits groupes, mais la plupart du temps, ce sont des couples que l’on rencontre. Souvent, on en voit dans les marais de Plaisance : Roux et blancs, stature haute, ils sont splendides !

Et pour finir …Car mon intention n’a jamais été de passer en revue tous les oiseaux d’Oléron, migrateurs ou sédentaires, oiseaux des grèves, oiseaux des marais, oiseaux des bois et des prés, oiseaux des jardins … Je laisse cet inventaire à la ligue de protection des oiseaux, qui a son siège à la corderie Royale de Rochefort … Elle le fait très bien : Vous pourrez rencontrer quelque jour leurs naturalistes, accroupis derrière les lunettes qui leur permettent d’observer les comportements des oiseaux : Ils sont souvent, l’hiver, entre La Brée et Saint-Denis, car c’est là que séjournent jusqu’au printemps les milliers d’oies bernaches qui repartiront vers la toundra de Sibérie.

Les chasseurs et les amoureux de la nature vous  diront  que les populations animales changent au fil des années : Il n’y a plus guère de perdrix sauvages, grises ou rouges … On fait des lâchers d’oiseaux d’élevage.

                                                           



Les faisans que l’on peut encore apercevoir, se courbant vers le sol et filant pour se cacher entre les rangs des vignes, sont tout droit sortis des volières d’un éleveur.
On ne rencontre plus guère de cailles que chez son volailler, toutes plumées et vidées ! Je ne sais pas trop si l’on trouve encore des bécassines .. .

Mais voyez-vous, ce qui me manque beaucoup, à moi … Ce sont les alouettes … Les humbles alouettes des champs : Oh ! Il y en a encore, bien sûr, mais cela fait bien longtemps que je n’ai vu une alouette, dans le petit matin, jaillir d’entre les mottes d’un frais labour et s’élever à la verticale, battant des ailes comme un colibri et chantant, chantant … On dit de l’alouette qu’elle grisolle et c’est un chant d’ivresse et c’est un chant d’allégresse  … J’ai longtemps rêvé, quand j’étais petit … Eh oui, c’était il y a bien longtemps ! … J’ai longtemps rêvé que, par un miracle du sort, je rapetissais, je rapetissais … J’enfourchais l’encolure d’une alouette et nous montions dans le soleil levant, nous montions en grisollant ! – Mais on dit que les alouettes sont sensibles à la pollution lumineuse et que nos éclairages électriques nuisent à l’espèce … C’est bien possible : Ne chassait-on pas l’alouette au miroir ?


                                                     


Je veux, je veux encore enfourcher l’alouette et, au rythme de ses ailes battantes, monter, monter, si haut que j’aurai vue sur l’ensemble de l’île et de ses marais, de ses côtes sur lesquelles les vagues se roulent en ourlets de sables … Je verrais jusqu’aux îles voisines, je verrais jusque sur le continent : La Rochelle, Rochefort, Royan  … Je crois que j’en défaillerais de bonheur.



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