mardi 17 septembre 2013

TREMBLEMENTS DE TERRE EN OLÉRON










LA TERRE SE SECOUE !






                                                         








C’était un soir comme les autres. Le temps était doux. Il n’y avait pas de vent. On entendait siffler les courlis dans les marais. Ce sont des sifflements très doux, flûtés, sur deux tons : Le premier long, le second très bref. On ne peut les confondre. Des vanneaux, je crois pépiaient.

Nous étions dans la maison du Douhet, grande longère située au bord de la route qui s’enfonce entre les marais pour rejoindre celle qui mène à L’Illeau puis à L’Île. Nous étions couchés : Nous regagnions toujours de bonne heure notre chambre car les journées étaient bien occupées lorsque nous étions en vacances là-bas : Les horaires des marées rythmaient nos jours et nos nuits. La marée basse était-elle à trois heures du matin, nous étions debout pour relever nos filets. La marée basse suivante était à quinze heures trente : Nous étions dans les rochers pour y dénicher les crabes …



                                                 




Les lampes à carbure étaient éteintes, mais pas depuis très longtemps … On sentait encore cette odeur aillacée de l’acétylène … Je n’oublierai jamais cette odeur !

Lequel de nous deux, mon épouse ou moi-même se dressa sur le bord du lit ?

-    « Tu entends ? me demanda Sophie … On dirait un train qui arrive ! »
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-    « Un train ! Il y a longtemps qu’il n’y a plus de voie ferrée en Oléron ! Tu parles … C’est tremblement de terre … Vite, il faut prendre les enfants et sortir … Vite ! »

                                        



Il faut dire que, les tremblements de terre, j’en avais l’expérience : J’avais vécu pendant trois ans dans l’archipel des Nouvelles Hébrides, sur le flanc d’un volcan de l’île de Tanna, et il faut préciser que ce volcan était en activité permanente. J’en avais enduré des secousses, et de belles !
Sophie n’avait pas la même expérience. Elle a mis un moment à réaliser ce que voulais dire lorsque je lui parlais de tremblement de terre. C’était vrai que l’on aurait dit un train qui passait … Un train, tu parles : Notre maison était située entre deux canaux : Le canal du Douhet par devant, l’étier des marais des Boulassiers par derrière ! … Réveiller les quatre enfants, les pousser, en prendre un dans les bras … Nous voilà dehors dans la nuit. Elle est claire, la nuit, heureusement. La lune est à son plein et son disque argenté éclaire tout le paysage … Le train … Le train qui roulait … Le train a roulé trois ou quatre minutes … C’est long, trois ou quatre minutes, quand un train vous arrive dessus !

En Oléron, un tremblement de terre ? – Passe encore au pied des volcans de la ceinture du Pacifique, mais dans l’île ? – Dans notre île !

                          




Mon père m’avait bien montré un bloc de pierre ponce qu’il avait ramassé sur la grève, à Chassiron. Il prétendait que cette pierre ponce provenait d’un séisme … Peut-être du séisme qui avait ouvert le pertuis d’Antioche … Il envisageait la possibilité de secousses terrestres qui auraient disloqué les rivages, ouvert non seulement le Pertuis d’Antioche, mais aussi celui de Maumusson et qui aurait isolé l’île d’Aix comme l’île Madame  … Je n’y avais pas beaucoup cru, mais sait-on jamais ! En fait, des morceaux de pierre ponce, il en dérive sur les océans … Depuis l’explosion du Krakatoa, en 1883 ! Il faut bien qu’ils finissent par s’échouer sur quelque rivage !

                             



Au petit matin, nous sommes éveillés dès potron-minet . C’est le déclic de la crémaillère que manœuvre l’écluse qui nous a tirés du sommeil …  Ah oui ! … Le tremblement de terre ! … Il n’y a pas eu de réplique. Bien souvent, il y a des répliques et je m’y attendais. Eh bien non, il n’y a eu qu’une seule secousse, mais elle a été sérieuse et longue. Nous nous précipitons à l’extérieur : Non, les cheminées ne sont pas tombées … Les murs ni le toit, rien n’a souffert : La bâtisse est vieille, mais mon père l’a bien entretenue. Dans le paysage, rien n’a changé : Aucun bouleversement … Tout est paisible. Les enfants ont besoin d’être rassurés, nous nous y employons. Le calme revient.

                           



Ah, mais oui ! Le calme revient … Lorsque nous arrivons à Saint-Georges pour y faire nos courses, toutes les commères sont dans la rue … Leurs hommes ramassent les tuiles qui sont tombées des toits. Quelques cheminées sont tombées aussi … Dans les cuisines, des pots de confiture sont tombés par terre … La secousse a été forte, tout de même ! À Saint Pierre, c’est le même spectacle … On dit que des gens qui étaient en vacances ont sauté dans leur voiture et se sont dépêchés de passer sur le continent. À en croire certaines commères, c’est presque une ruée qui a eu lieu ... Ces racontars sont quelque peu exagérés, mais il est vrai que certains ont eu assez peur pour prendre la poudre d’escampette. On m’a assuré que certains ont mis leur maison oléronnaise en vente dans les jours qui ont suivi, se jurant de ne plus mettre les pieds dans l’île. Je l’ai vérifié, c’est vrai : Il y a eu des résidents secondaires qui ont vendu leur maison ...

Je ne me souviens plus de la date exacte à laquelle ce tremblement de terre s’est produit … Ce devait être un peu avant 1970 : J’ai dans ma vie des repères qui me permettent de situer les évènements dans cette époque là, et d’ailleurs, n’importe quel Oléronnais précisera les choses, en creusant un peu sa mémoire.

                           



Il y a eu d’autres tremblements de terre en Oléron, certains plus récents. À l’époque, des chercheurs autorisés m’ont confirmé qu’Oléron était bien située en zone sismique : La poussée de l’érection des montagnes pyrénéennes s’exerce, me disaient-ils de telle façon qu’elle bute sur le massif Armoricain et les secousses sismiques ont lieu dans les parages oléronnais. D’autres spécialistes, depuis, ont remis en cause les tracés des lignes de fracture : J’ai souvenir d’une enquête publique qui avait lieu en mairie de Dolus .. Il s’agissait d’un important projet de construction à la Vezouzière. Lorsque j’ai consulté le dossier de l’enquête, j’ai tout de même été plus que surpris de découvrir qu’un trait rouge était tracé sur les plans : Il coupait la zone de la Vezouzière très exactement par le milieu … La légende éclairait les choses : Il s’agissait de rien de moins que du tracé de la « ligne de fracture sismique » ! Je n’ai pas la prétention d’affirmer  que ce sont mes observations qui ont fait abandonner le projet … Mais il fut bel et bien abandonné ! D’autres projets virent le jour, toujours concernant la zone de la Vezouzière … Mais il paraît que, maintenant, les spécialistes ne reconnaissent plus de ligne de fracture sismique à cet emplacement  … On veut bien y croire … Plaise au ciel que cet effacement de la ligne de fracture ne résulte pas d’un appétit du gain tel que les milieux de l’urbanisation en ont connu en d’autres endroits !

                            

             
             Explosion du volcan Yasour, aux Nouvelles-Hébrides (actuel Vanuatu).

Mais ne vous empressez pas pour autant de sauter dans votre voiture et de passer le pont : Après tout, la prochaine secousse … C’est peut-être bien sur l’autre rive du coureau d’Oléron qu’elle aura lieu … Si elle a lieu !
 
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