lundi 28 juillet 2014

LA VENTE DES ÉPAVES












LA VENTE DES ÉPAVES


« Les Naufrageurs » !  Rien qu’à prononcer ce nom, mon échine tremble : Que de récits, que de drames ! Qui n’a pas entendu parler de ces naufrages ? Qui n’a pas entendu parler de ces villageois qui vont, après les tempêtes, récupérer les épaves laissées sur les rochers par les vagues ?

Au besoin, dit-on, les « naufrageurs » provoquaient la perte des navires : Ils allumaient des feux sur la côte, pour désorienter les pilotes dans la nuit, leur faisant prendre ces feux pour l’entrée du port.

Combien y en a-t-il eu, des naufrages ? … Et combien de marins se sont noyés !

Mais les règlements maritimes ont mis fin à ce brigandage. Toute épave rejetée par la mer appartient à l’État et aucune ne peut être ramassée. La douane est chargée d’y veiller. Des gardes-côtes sont choisis et assermentés, eux seuls doivent ramasser les épaves. Ils les entreposent chez eux et, périodiquement, un représentant de la douane vient les vendre aux enchères.

Les épaves sont parfois nombreuses et de natures diverses. Beaucoup proviennent de cargaisons mal arrimées sur le pont des bateaux : Poutres et planches, embarcations diverses, fûts vides ou pleins … Que sais-je encore ?

Un jour, passant à la Cotinière, j’aperçois un amoncellement disparate à l’angle d’une rue, vers l’école … Il y a là, attirant l’œil par sa couleur rouge vif éclatante, un superbe canoë en toile tendue sur une armature de bois verni. Il est tout neuf. J’ai vu le même sur le catalogue de « Manufrance ». Sans doute a-t-il dérivé. Peut-être vient-il de très loin ! Je veux ce canoë !

Au jour dit, je vais assister à la vente. Le douanier nous emmène d’abord aux Huttes Seulières. Là ; au bord de la plage de galets, on vend au plus offrant un lot de poutres et de chevrons … Les bois qui ont séjourné dans l’eau de mer sont intéressants pour la construction : Les termites ne les attaquent pas. J’achète un lot de bois flottés … Ils seront parfaits pour l’agrandissement de ma maison que je projette !
Je laisse sur place mon acquisition : Je reviendrai la chercher plus tard avec un camion.

Puis nous allons à la Cotinière. Nous formons un petit groupe qui s’agglutine autour des objets à vendre.

« Nous allons commencer par ce superbe canoë à armature de bois verni. Bois et toile sont en parfait état … Nous commençons à deux cents francs … Qui veut ce splendide canoë pour deux cents francs ?" Nous sommes trois à enchérir. L’un de mes deux adversaires abandonne très vite … L’autre fera monter le prix un peu plus haut que celui que j’avais prévu, mais enfin … Je l’ai !

Je le démonte, je plie la toile … Le voilà rangé dans le coffre de ma voiture … Le mois prochain, je pars en Polynésie pour trois ans … Le canoë voguera sur le lagon !

Ah bien oui ! … C’était oublier qu’un lagon, c’est parsemé de coraux … Et que le corail, ça déchire très bien la toile d’un canoë ! Le mien finit à l’ombre d’un cocotier et les crabes en ont déchiré la toile !

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