OLERONNADES, de Michel
Savatier
Réflexions sur une île en
perte d’identité.
Michel
Savatier est-il un auteur sérieux ?
On est parfois tenté
De
s’interroger à ce sujet. Il est vrai qu’il vit une partie du temps dans le
Midi. Ce qui explique peut-être que ses Oleronnades riment souvent avec galéjades. On ne s’en plaint pas,
d’ailleurs.
Dans
l’oeillet d’oleron et le lys du japon, il évoquait ses ancêtres herborisant sur les dunes. Quand oleron
était une île raconte surtout ses
souvenirs d’enfance, avec, pour jeu préféré, la pêche, toutes les pêches, y
compris celles dans les fameuses écluses à poisson. Il nous décrivait aussi
un grand-oncle se rasant avec un
coupe-chou. C’était attendrissant.
L’enfance est encore présente
dans Oleronnades. En partie
seulement. Refusant de se cantonner dans un seul genre, chapitre après
chapitre, notre narrateur sautille d’un registre à l’autre, passant du conte à
la sottie (mot ancien qui vient de sot), de la fantaisie historique délirante (
un genre qu’il pourrait bien avoir inventé) au récit dramatique qui donne des
frissons. Comme il est en même temps visionnaire et naturellement poète, on le
suit, charmés, mais tout de même secoués et ballottés comme sur ces voiliers de
jadis sur lesquels il nous emmène savourer les tempêtes du Cap Horn (grand
voyageur, il adore le Cap Horn). Il met aussi en scène l’abbé Pierre-Marie
Kieffer au temps où il était curé de Saint-Pierre. On doit à l’abbé Kieffer la
création du musée Aliénor d’Aquitaine qui est devenu le Musée de l’île
d’Oléron.
On le trouve ensuite sur les
plages de l’île, contemplant l’infini en solitaire et humant le vent du large.
Il y ramasse des os de seiche qui ont rétréci, et constate (comme c’est
bizarre !) que certaines espèces ont disparu. Romantique, il joue avec les
mouettes et les goélands (lui, au moins, fait
la différence !) et, avant d’offrir un bouquet de roses à sa bien-aimée,
s’émerveille longuement de la cétoine dorée posée sur l’une d’elles.
Ne nous y trompons pas
pourtant ! Michel Savatier n’est pas toujours le doux rêveur inoffensif
que l’on pourrait croire. Il est juste assez sérieux pour signaler en passant
les dangers qui guettent son île, comme la création d’un complexe balnéaire de
béton auquel elle a échappé de justesse. Sans cesser de badiner, il souligne
une certaine perte d’identité qui serait due, entre autres, à la prolifération
de résidences secondaires sans caractère et autres
« terrains de
loisir ». Mine de rien, il informe le monde que le tiers des terres de
l’île est en dessous du niveau de la mer, et que l’océan qui ronge la côte
pourrait aussi prendre ses aises de ce côté-là. Il y aurait peut-être quelques
précautions à prendre pour tenter de l’éviter.
« À bon entendeur,
salut ! », nous dit cet amoureux d’Oléron.
M.P.
La Plume des
Fadets (Juin 2015)
(Reproduit avec l’autorisation
de l’auteur)
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