C'était le 8 septembre 1953, en Oléron
C'était hier !
Document fourni par Jean-Claude Pelletier
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C'était il y a soixante ans ...
Le 8 septembre 2013, en l'Église de Saint Georges d'Oléron, les Oléronnais commémoraient la tragédie qui a coûté la vie à douze des leurs, au cours d'une partie de pêche à la senne, à Bellevue, près de Boyardville.
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Surprises par la brume et la marée montante
Douze personnes périssent noyées
au cours d’une partie de pêche
en face de Boyardville
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*
"Ils partirent. Il y avait l'Abbé Michel Jourdain, qui, plus tard, devait être le seul rescapé, M. Henri Favre, cultivateur à Chéray, Bernard Mothe, de Chéray, Pierre Joyeau et sa femme, née Solange Texier, de Chéray, Jean Joyeau, Boulanger à Chéray, Abel Massé, de Le grand Village-plage, sa fiancée, Mademoiselle Pierrette Météreau, de Chéray, Michel Chocard, de Saint Pierre d'Oléron, L'Abbé Jean Baudoin, originaire de Courlay, le moniteur Michel Fradin, de la colonie des Goëlands er demeurant à Niort, Monsieur Michel Foucaud et son épouse, née Lucette Joyeau, laitier, de Saint Pierre d'Oléron."
***
*
« Nous avions fini de pêcher. Il était
environ minuit et nous étions en train de plier les filets. L’eau nous arrivait
alors jusqu’à la poitrine. Les filets pliés, nous décidâmes de regagner la
côte, mais un épais brouillard nous entourait et nous avons dû prendre
vraisemblablement le nord pour le sud, trompés par une visibilité absolument
nulle.
« Au bout de quelques mètres, nous
avions perdu pied et déjà les femmes commençaient à hurler. Je réussis à
trouver un haut fond de sable, sur lequel je me hissai et je fis signe à mes
compagnons de venir me rejoindre. Ce fut pour nous un instant de répit, mais
hélas ! La mer continuait à monter inexorablement et le désespoir des
femmes, la colère et la peur des hommes étaient un spectacle effroyable.
Lorsque nous ne pûmes plus rester sur ce haut fond de sable, je décidai avec
l’abbé Baudouin et Michel Fradin de nager le plus longtemps possible.
Hélas ! L’abbé Baudouin, novice en natation, coulait quelques instants
après.
« Michel
Fradin nageait à mon côté. C’était un excellent nageur. Nous gardions le
contact en nous appelant de temps à autre, tandis que non loin de nous nous entendions
les derniers cris de désespoir de nos infortunés camarades.
« Au
bout d’un certain temps, Fradin me dit soudain : « J’ai une crampe,
je vais couler, nous nous retrouverons au ciel ! » Et il disparut.
« C’est
alors que, seul, je fis un effort pour conserver tout mon sang-froid et que
j’observai le ciel. C’est grâce à une étoile que je ne cessais de fixer, et en
étant guidé par le bruit que faisaient les vagues qui déferlaient sur la plage, que je pus regagner la terre
ferme, après avoir nagé depuis plus de trois heures et accompli cinq
kilomètres. »
(Récit de l'Abbé Marcel Jourdain, seul rescapé.)
***
COMMENT
LE DRAME SE SERAIT PRODUIT
"C’est un terrain extrêmement difficile entre
Bellevue et Méré, terrain parsemé de trous d’eau, de viviers, de bouchots et
comportant des bancs de vase où les pêcheurs s’étaient engagés.
Généralement, les Oléronnais qui pratiquent la
pêche côtière, la nuit, dans ces parages, situent leur position grâce aux feux
de l’île d’Aix, de Fouras, de Port-des-Barques, de Boyardville, grâce aux
éclats des phares de Chassiron et des Baleines. Faut-il conclure que la brume,
absorbant ces signaux lumineux, rendit tout repérage impossible ?
Dans ce cas, surpris par le flot montant, les
pêcheurs, qui s’étaient divisés en deux groupes, ont dû, soit tomber dans les
trous d’eau, soit, sentant la route du retour coupée sur leurs arrières au
moment de la traversée du chenal d’Arceau, s’enfoncer vers la mer.
C’est Raymond Moreau, habitant de la Vieille
Perrotine, qui, à 5 heures du matin, découvrit l’abbé Jourdain. Exténué, dans
un état complet d’épuisement, le prêtre ne put murmurer que quelques
indications confuses."
***
TOUTE L’ÎLE
D’OLÉRON A CONDUIT SES MORTS À
LEUR DERNIÈRE DEMEURE
Oléron, 12
septembre 1953. – La douleur, qui a de multiples visages, en revêtait des
milliers vendredi matin dans l’île d’Oléron. Très loin sur les routes, des
femmes en noir, des hommes endimanchés, le visage marqué d’une douloureuse
impassibilité, se rendaient par tous les moyens à Saint-Georges-Chéray.
Tous les
Oléronnais, qu’ils soient ou non touchés directement par la catastrophe qui,
dans la nuit de mardi à mercredi, a plongé douze familles dans la douleur, ont
tenu à accompagner les corps des victimes à leurs dernière demeure.
Jeudi, déjà,
après une émouvante cérémonie, les corps de l’abbé Jean Baudouin et de Michel
Fradin avaient été ramenés vers leur terre natale. Plus tard, Grand-Village
avait fait des obsèques solennelles à son disparu, Abel Massé.
Vendredi matin,
toute la population de Saint-Pierre accompagnait Michel Chocard à sa dernière
demeure.
Mais c’est
vraiment à Saint-Georges qu’allait se dessiner, en fin de matinée, toute
l’ampleur du deuil de l’île."
9 commentaires:
In mémoriam
Ce drame qui a frappé plusieurs familles oléronaises ,en septembre 1954,a été une tragédie ! Georges Foucaud était mon oncle et Lucette Joyau ,son épouse ,ma tante !J'avais seize ans à l'époque et travaillais au chantiers navals de La Pallice,comme chaudronnier ,lorsque j'ai appris ce drame épouvantable ! Un grand vide est resté béant depuis dans ces familles touchées dans leur intégrité !Je découvre le récit de ce traumatisme ,aujourd'hui ,mercredi 5 décembre 2018 !
Bonjour M. Savatier,
Je suis l'un des 5 enfants orphelins de la famille Joyeau (Solange et Pierre) et le seul survivant de ces 5 orphelins.
Avec mon frère Alain et ma sœur Colette, je fus adopté par des gens bien trop différents de mes vrais parents, Solange et Pierre. Des parents totalement incompétents pour élever des enfants, leur aisance financière ne pouvaient pallier à cette incompétence. De plus, interdiction totale de communiquer avec la sœur et le frère, mais aussi avec toute notre famille d'origine. Abominable! Ignoble! Mais bon. Logés, nourris, c'est mieux que rien.
Nous furent donc adoptés et séparés de notre petit frère et de notre sœur ainée. Notre adoption à l'époque fut une adoption nommée plénière, ce qui veut dire que nous portons le nom de Nader, avec un certificat de naissance affirmant que je suis né de ces deux personnes (incroyable, n'est-ce pas). L'autre forme d'adoption se nommait légitime, ce qui veut dire que mon frère et ma sœur ont gardé leur nom d'origine: Joyeau.
En venant de découvrir cette commémoration du 8 septembre 2019 à la fois touchante et bouleversante que vous avez judicieusement publié sur le Net, je comprends pourquoi depuis quelques années je me suis mis à écrire un scénario (mon métier) qui raconte précisément cette tragédie. Il n'y pas de hasard, mais que des rendez-vous ! Mon scénario vient d’être finalisé. Le monde du cinéma étant difficile, je suis à franchir l'étape d’être sélectionné pour intéresser des réalisateurs et des producteurs.
Et cette histoire scénarisée est la mienne, donc je suis le scénariste qui écrit sa propre histoire, une des tranches les plus importantes de ma vie.
Scénariser sa propre histoire, ce n’est pas courant.
Lorsque le film sera réalisé (les lieux de tournage devraient se faire immanquablement à l'Ile d'Oléron) il est certain que cela touchera les habitants de mon village natal Chéray.
Que cela touchera aussi tous les habitants de l’Ile d’Oléron et peut être même les pêcheurs.
Tous ces gens seront informés et pourront voir le film ce qui se rajouterait à leur commémoration!
Sans l’ombre d’un doute, la mémoire collective est bien vivante chez les Oléronnais, puisqu’ils commémorent la tragédie.
Un film qui pourrait également toucher les orphelins séparés par une adoption désastreuse, adoption bien soulignée dans le scénario et qui est, avec la tragédie, le cœur même de l'histoire !
Le beau témoignage de Jean-Pierre du 5 décembre 2018 disant qu'il a vécu lui aussi la tragédie à 16 ans( moi, j'avais 6 ans) dit que Georges Foucaud était son oncle et Lucette Joyeau sa tante (donc,la sœur de mon père) font que je déduis que lui et moi sommes cousins.
Je ne sais comment le contacter.
Voilà 40 ans que j'ai immigré dans ce beau coin de la planète, le Québec.
Grâce à la fabuleuse technologie d'Internet, nous sommes en contact et vous apprenez que quelque chose d'important va possiblement (à sa façon) commémorer cette tragédie. Qui sait si le lancement du film pourrait se faire par exemple le même jour qu'une autre commémoration, c'est à dire le 8 septembre 2019 ou 20120 ?
Voilà. Au plaisir de vous lire et de lire Jean-Pierre.
Bien cordialement.
Jean-Claude Nader, scénariste indépendant.
Désolé,M.Savatier mais deux petites erreurs de date : ...cette commémoration du 8 septembre 2013 et non 2019.
Puis ... même jour qu'une autre commémoration, c'est à dire le 8 septembre 2019 ou 2020 et non 20120.
Je suis très surpris de me découvrir un cousin,dont je n'avais absolument,jamais entendu parler!Et pour cause!Mon père,s'était fâché avec ses frères, beaux-frères et belles-sœurs,lors du décès ma grand'mère Augustina Foucaud ,née Troussereau,tuée par une voiture allemande,pendant la guerre 1939-1945,pour une question d'héritage !J'ai brisé par la suite l'"omerta" qui était de rigueur,après ces faits !J'ai ,je pense de bonnes relations avec les cousins et cousines qui me restent encore sur l’île d'Oleron !J'habite actuellement dans le VAR et serais très heureux de pouvoir communiquer avec ce cousin du Québec,malgré mes 83 ans !
Bonjour Jean-Pierre.
Pour me contacter directement, mon adresse courriel: jcl.nader@sympatico.ca.
Il est vrai qu'une tragédie peut provoquer un grand vide et meurtrir des familles entières.
Et les trajectoires de chacun de survivants se dispersent souvent, car leur vie prend différentes directions.
Ma présence au Festival de Nice du 11 au 18 mai sera à la fois courte et intense. C'est pour moi une opportunité de réaliser mon beau projet de film. Tel que je l'ai déjà écris, un projet qui pourrait toucher profondément les orphelins du drame et tous Oléronnais. Et pourquoi pas faire en sorte que la sortie du film se fasse un 8 septembre !
Ma courte présence dans l'Hexagone durant le Festival (ouvert au public) peut-elle être une aubaine pour se rencontrer ? Du Var à Nice, est-ce une énorme distance? Mais aussi, auriez-vous le temps?
J'ose également espérer que Michel Savatier ainsi que Jean-Claude Pelletier et Guy Delavois aient l'idée d'aller sur ce site et puissent lire ces échanges. Je ne sais comment les contacter. Avez-vous une idée? Particulièrement Jean-Claude Pelletier et Guy Delavois qui ont fournis ces documents de l'époque de la revue Le Détective daté du 21 septembre 1953. Avoir accès au contenu de la revue serait très utile pour moi et le tournage du film.
Voilà.
Au plaisir.
Jean-Claude
Bonjour
Je viens de lire vos commentaires. Notre famille est concerné par ce drame. En effet ma grand mère a perdu son frère Abel Massé du Grand village. Il avait 27 ans et etait accompagné de sa fiancée Pierrette Metereau. Ma mere avait 6 ans au moment du drame. Elle a profondément etait marqué par ce douloureux événement . Mes parents connaissent bien Jean Claude Pelletier. Si vous avez besoin n hesitez pas.
Cordialement
Muriel
Chers "Gégé " et Jean-Claude Nader : Faut-il arriver au crépuscule de notre existence pour évoquer ce drame? Il est vrai que cet événement a surtout frappé plusieurs familles de l’île d'Oléron,et qu'il en reste encore quelques descendants qui tentent de se souvenir de cette année funeste de 1954!Il aura fallu soixante quatre ans ,pour évoquer cette tragédie ,en lisant tout à fait par hasard ,l'article
de Mr Jean-Claude Pelletier qui a été publié sur ce site ,et qu'il faut remercier,pendant qu'il est encore là ! Je regrette de n'avoir pas pu rencontrer Jean-Claude Nader à Nice,lors de son séjour,ayant des rendez-vous à l’hôpital Ste Anne à Toulon aussi bien pour mon épouse que pour moi ! Nous avons tous à l'heure actuelle ,des frère ou cousins ,sur cette belle île d'Oléron !C'est en effet ,mon cas !Mais l’âge est devenu un handicape ,pour se déplacer ,du Var vers la Charente-Maritime !
Bien cordialement,
Jean-Pierre
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